Chaumier : un vieux métier d’avenir
Rentrer dans le petit monde de la couverture en chaume nous a été plus facile que nous l’aurions pensé au premier abord. La petite chaumière paysanne bâtie avec une partie de la récolte du blé ou du seigle dans les champs des paysans n’a plus court aujourd’hui. C’est bien l’affaire de professionnels, d’artisans qui sont de moins en moins nombreux, leur savoir s’en allant avec eux.
« Rentrer dans le petit monde de la couverture en chaume nous a été plus facile que nous l’aurions pensé au premier abord. »
Malgré tout, nos premières rencontres avec des chaumiers se passèrent pour le mieux. Tous furent heureux de nous accueillir sur leurs chantiers pour nous expliquer leur façon de mettre en œuvre le chaume sur les toits qu’ils soient de Normandie, de Bretagne ou bien encore de Corrèze.
Mise en œuvre qui varie toujours quelque peu en fonction des personnalités, chacun ayant sa propre opinion sur les épaisseurs de roseau à mettre en toiture, la pente minimale à observer, les techniques à employer et bien d’autres choses encore … . Cela est assurément du au fait que chaque territoire garde l’héritage de son histoire, de ce qu’on produit sur celui-ci, tout ça détermine en partie le caractère des artisans.
Surtout, il n’existe plus de centre de formation proposant l’apprentissage du métier aux jeunes intéressés, qui pourtant, sont de plus en plus nombreux. La multiplication des centres de formation en éco-construction, la structuration de la filière paille qui a pris un bel essor ces dernières années fait émerger une génération friande de construction avec des matériaux bio-sourcés. Le roseau n’y échappe pas.
De jeunes architectes pleins d’initiatives, des passionnés du travail de la main, des ingénieurs en reconversion, tous ces profils viennent régulièrement sur les chantiers. Parfois pour jeter un œil, poser des questions, faire des stages et parfois se passionner d’un métier ancien, esthétique, qui reste aussi au cœur de ce que peut représenter l’architecture du futur.
« De jeunes architectes pleins d’initiatives, des passionnés du travail de la main, des ingénieurs en reconversion, tous ces profils viennent régulièrement sur les chantiers. »
Ce petit monde donc, se resserre encore plus si l’on prend en compte toute la filière depuis la coupe jusqu’à la pause du chaume. En effet, la quasi-totalité du roseau posé vient aujourd’hui de Camargue. Les anciennes roselières de Brière et de Bretagne sont désertées, les coupeurs se font rare du fait de la grande pénibilité de la tâche à accomplir.
Couper du roseau dans les marais en hiver, dans des zones humides de manière semi-mécanisé et soumis aux aléas du temps font rares les prétendants pour ce genre de poste. Il y a bien encore un peu de roseau coupé en Baie de Seine et quelques fous pour remettre la paille de seigle au goût du jour, mais en réalité cela reste marginal et de façon générale les effectifs sont en baisse.
Une centaine de chaumiers sont recensés à présent en France, plusieurs ont opté pour la main d’œuvre étrangère provenant majoritairement d’Europe de l’Est, de pays ou la couverture en chaume est plus développée que chez nous, et où le personnel qualifié ne manque pas.
A ajouter à cela, le roseau qui de plus en plus provient de Hongrie, des Pays-bas voir de Chine parfois. Ces phénomènes nous font penser que la filière pourrait avoir besoin d’être rafraichie, revalorisée pour qu’elle reste pérenne dans le temps et peut être prendre la voie de ce qui a été mené sur la construction en paille.
Au départ, nous partions un peu à l’aveugle, guidés par les annonces d’auto-constructeurs sur le site Twiza.
Quentin venait d’obtenir son diplôme en OPEC (Ouvrier Professionnel en Eco-construction) mais cette fraîche qualification, bien que passionnante lui avait dépeins un tableau tous azimuts qui le laisser perplexe sur la suite de son avenir professionnel. L’envie d’approfondir certaines problématiques et de savoir quel métier lui siérait réellement restait un immense champ des possibles.
Quand à moi, Pauline, architecte d’intérieur, je continuais mon bout de chemin paisible dans l’aménagement d’espaces tertiaires, depuis 5 ans mais les sujets auxquels Quentin avaient accès me charmaient doucement, de loin. Ces prémices lançaient également l’envie d’avoir un impact, même à petite échelle, en tant que designer, créateur d’espaces dans le monde actuel.
En 2019, entre une rentrée en formation pour l’un et le lancement dans l’entrepreneuriat pour l’autre, nous décidons de nous débarrasser de notre location en ville pour acheter un camion à aménager nous-mêmes. C’est le début d’une vie nomade jusqu’alors inconnue pour les deux citadins que nous étions depuis 10 ans.
Jusqu’au mois de mai 2020, le camion nous fera vadrouiller au sein d’un périmètre déjà plus ou moins connu, de la Haute-Garonne, en Ariège, en passant par le Tarn et l’Aude. Nous combinons formation, projets de clients et travaux sur le camion durant l’année 2019.
Puis, en mai 2020, c’est le grand départ pour le Tour de France et l’apprentissage de techniques éco-construites et éco-conçues.
Nous mettons en pratique désormais les savoir-faire sur lesquels nous nous sommes formés en tant que couvreur-chaumier pour Quentin et en conception d’habitat écologique pour moi.