Cobbauge : innovation thermique et terre crue

Publié par Pauline Puerta le

Photo d'un chantier de construction cobbauge

C’est un ballet incroyable qui s’orchestre sur les chantiers de terre porteuse. Entre le tourbillon onctueux de la terre liquide, et la cadence vibrante de la bétonnière qui liera paille et terre pour le mélange isolant, nous sommes déjà pris dans le rythme effréné du chantier.

Ce n’est pas tout ! Juste à côté de ce premier tableau, la pelle mécanique s’abaisse et s’élève dans une répétition régulière pour préparer le mélange porteur : la bauge. Le bâtiment pilote qui se construit de ces recettes est juste à côté, à quelques pas pour rendre le chantier pratique dans sa manutention.

« De la préparation de la matière à la mise en œuvre, les constructeurs engagent leur corps entier dans le geste.»

Au dessus des 4 premières levées, des voltigeurs s’activent, attrapant de leurs mains les amas de bauge et les fracassant dans les banches pour les piétiner ensuite. Un autre protagoniste se charge de tasser avec entrain le mélange terre-paille à l’aide d’un outil de bois. De la préparation de la matière à la mise en œuvre, les constructeurs engagent leur corps entier dans le geste.

La technique de la bauge, construction ancestrale et vernaculaire des régions bretonnes et normandes, est un travail extrêmement physique qui s’effectue en équipe.

Croquis de murs en bauge

Pour le projet Cobbauge, certaines étapes de construction sont en partie mécanisées ou pensées pour être mises en œuvre plus rapidement, l’idée étant de rendre la construction en bauge plausible dans un contexte économique qui n’est plus celui d’un temps où « construction » ne rimait pas avec « rentabilité ».

Sur d’autres chantiers, des techniques manuelles sont pensées afin, au contraire, de redonner toute sa part sociale à la construction en terre-crue pour organiser des chantiers participatifs formateurs.

Elle se fait alors en grand groupe, la pelle mécanique est remplacée par les pieds des constructeurs qui s’amusent de rythmes soutenus pour noyer la paille de terre plastique. La chaîne de travail apport-mélange-lancé-mise en œuvre se met rapidement en place avec des lanceurs à la fourche et des sculpteurs de murs fiers de voir s’élever un édifice fait de leurs savantes mains non initiées.


Pauline Puerta

Au départ, nous partions un peu à l’aveugle, guidés par les annonces d’auto-constructeurs sur le site Twiza. Quentin venait d’obtenir son diplôme en OPEC (Ouvrier Professionnel en Eco-construction) mais cette fraîche qualification, bien que passionnante lui avait dépeins un tableau tous azimuts qui le laisser perplexe sur la suite de son avenir professionnel. L’envie d’approfondir certaines problématiques et de savoir quel métier lui siérait réellement restait un immense champ des possibles. Quand à moi, Pauline, architecte d’intérieur, je continuais mon bout de chemin paisible dans l’aménagement d’espaces tertiaires, depuis 5 ans mais les sujets auxquels Quentin avaient accès me charmaient doucement, de loin. Ces prémices lançaient également l’envie d’avoir un impact, même à petite échelle, en tant que designer, créateur d’espaces dans le monde actuel. En 2019, entre une rentrée en formation pour l’un et le lancement dans l’entrepreneuriat pour l’autre, nous décidons de nous débarrasser de notre location en ville pour acheter un camion à aménager nous-mêmes. C’est le début d’une vie nomade jusqu’alors inconnue pour les deux citadins que nous étions depuis 10 ans. Jusqu’au mois de mai 2020, le camion nous fera vadrouiller au sein d’un périmètre déjà plus ou moins connu, de la Haute-Garonne, en Ariège, en passant par le Tarn et l’Aude. Nous combinons formation, projets de clients et travaux sur le camion durant l’année 2019. Puis, en mai 2020, c’est le grand départ pour le Tour de France et l’apprentissage de techniques éco-construites et éco-conçues. Nous mettons en pratique désormais les savoir-faire sur lesquels nous nous sommes formés en tant que couvreur-chaumier pour Quentin et en conception d’habitat écologique pour moi.